Ça m’est finalement rentré dedans. Cette grisaille dans le coeur. Cette boule qui remonte jusqu’aux yeux. Ce soir, c’est finalement arrivé. Cette tristesse.
Après des jours à fonctionner au mieux, positivement, à regarder les arc-à-ciels, les #toutvabienaller. Après des jours avec cette petite crainte latente de l’inconnu, que l’optimisme et la résilience essayent de repousser jusqu’au ventre, jusqu’aux pieds. Ça remonte tout le temps, mais tout va bien aller.
Je fais partie des chanceux. De ceux qui regardent passer en travaillant, en rénovant, en jouant. En respectant les directives. Je ne fais pas partie de ceux qu’on a remerciés et qui regardent le vide. Je n’ose pas imaginer l’incertitude.
Je ne suis pas non plus un service essentiel. Je ne passe pas mes heures à m’épuiser, à risquer ma santé, à regarder le risque en face et à le braver quand même. Je n’ose pas imaginer l’angoisse.
Je suis comme bien d’autres. À rester à la maison, à attendre en multipliant les distractions. En composant avec le travail à la maison. En réalisant tous les bienfaits de l’ergonomie…
L’universel et le personnel. Rarement une expérience aura été si partagée. Rarement nous demandons à un ami, à l’autre bout de l’hémisphère, comment il va, en sachant tous les deux, de quoi on parle exactement. Dans un monde où tout nous était individuellement destiné, nous n’avions plus beaucoup en commun avec notre voisin. Maintenant, il y a toujours un sujet de conversation. Nous aurions préféré autre chose. La distance forcée nous a rapprochés. Plus que jamais, nous réalisons que nous sommes interconnectés.
Dans notre existence commune, il y aura toujours ce schisme, celui de l’avant et de l’après. Et comme toute transition, celle-ci nous arrachera le coeur au passage. Du moins un moment.
Il y a plein de ces petites histoires, cachées derrière la grande, l’universelle. Il y aura un avant et un après, et il y aura ce qu’on aura perdu : des projets de mariage, de voyage, des collègues de travail ou de classe, que nous ne reverrons plus. Des petits projets à l’eau, qu’on regrette sans bruit.
Cachés derrière la grande tragédie, ce sont des mini deuils que nous faisons dans le silence. Des mini deuils que nous gardons pour nous, parce que la perspective les fait paraître insignifiants. Parce que s’il y a une chose qu’un tel bouleversement nous donne, c’est de la perspective.
Nous devons rester forts, nous devons rester optimistes. Mais nous pouvons aussi, pendant quelques instants de notre solitude universelle, prendre un instant pour panser nos blessures.
Bel article, merci beaucoup. J’aime bien l’idée de décomposer le grand bouleversement que nous vivons en une multiplicité de petits deuils. Cela me semble alors plus facile à affronter…
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Je suis contente d’avoir pu vous aider 🙂
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